Cette nuit là…

Nous étions des enfants, nous étions amoureux. Nous étions amoureux comme on peut l’être quand on a 14 et 17 ans. Tu m’appelais ta sirène, c’est vrai que je ne quittais pas cette eau froide, glacée, qui verdissait mes yeux. Je me délectais de cette eau salée qui gouttait de mes cheveux sur ton corps quand je te rejoignais enfin sur la plage. Tu étais irrésistible à mes yeux, ta peau douce tes membres élancés. Comme tu étais grand… tu m’enlaçais dans ton éclat de rire tu m’humais pour m’absorber au fond de ton coeur me disais-tu. Tu me faisais vibrer au son de ta guitare sur les gipsy kings. Je devenais gitane dansant pied nus pour toi. La peau dorée au soleil, les pieds griffés par le sable, je dansais pour toi. Et tu riais à gorge déployée.

Cette nuit-là, seuls dans la baie aux renard, regardant le reflet de la lune sur la mer apaisée par sa journée, tu as tenu la promesse que tu m’avais faite avec cet air sombre au début de l’été… Me faire oublier que ma première fois avait été un viol sordide. Tu m’as prise dans tes bras, tu m’as déshabillé avec envie, avec douceur, avec passion. Je n’oublierai pas. Ton odeur… ta peau… tes muscles qui se tendent, qui se retiennent. Tes yeux qui deviennent braise, mon ventre qui se liquéfie… je n’oublierai pas. Ton tremblement, ton souffle qui s’accélère, tes caresses qui deviennent plus précises, mes gémissements, mais d’où sortent-ils? Je n’oublierai pas. Nos corps qui se mêlent, qui ne deviennent qu’un. Mon âme dans ta main, ton coeur sur mon sein. Je n’oublierai pas. Faire l’amour jusqu’au matin sur une plage alanguie sous le clair de lune, ce n’est rien quand on est enfant. Quand on est amoureux. Puis, ramasser les couvertures, un peu honteuse quand la nuit blanchi. Me confronter à ton rire moqueur de cette honte qui n’a pas lieu d’être. Entraînée par ce rire, par ces étreintes de l’après, courir à la boulangerie chercher les premières brioches brûlantes et les manger en regardant le soleil se lever sur les maisons blanches endormies. En balayant d’une main mes cheveux qui dansent au vent de la mer Egée.

Le soleil était irréel dans son éclat ce matin d’août. Il voyait la femme qui venait de naître. Celle qui allait commencer sa vie avec cette nuit comme repère d’amour.

Merci, K.

Je ne t’ai pas oublié.

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